Comment faire face au bouleversement de la naissance de son bébé quand il arrive bien avant son terme ? Comment gérer ses angoisses et son inexpérience quand c’est sa toute première grossesse ? Toutes ces problématiques, Mélanie les a vécues avec son compagnon. Ils sont les heureux parents d’une petite Maëly, née à 27 semaines d'aménorrhée (SA), soit 10 semaines avant son terme, pour un poids de 810g seulement.

Avant de vous dévoiler le contenu de l’interview de Mélanie, quelques petites précisions techniques s’imposent sur la prématurité des bébés.

Qu’est-ce qu’un bébé prématuré ?

Un bébé prématuré est un bébé qui nait 2 semaines avant son terme, c’est-à-dire avant 37 semaines. En 2020, ils étaient 5%. C’est une problématique qui peut toucher tous les parents.

Les niveaux de prématurité d’un bébé

  • Bébé à prématurité tardive : naissance entre la 35 et 36ème SA, poids d’environ 2,5 kg.
  • Bébé à prématurité modérée : naissance entre la 32 et 34ème SA, poids entre 1,5 kg et 2 kg.
  • Bébé à grande prématurité : naissance entre la 28 et 31ème SA, poids entre 1 kg et 1,5 kg.
  • Bébé à prématurité extrême : naissance avant la 28ème SA, poids en dessous de 1 kg.

Certains bébés se remettent très vite de leur retard en retrouvant une courbe normale de croissance. D’autres vont garder quelques séquelles en grandissant. Tout va dépendre du degré de prématurité et de la qualité des soins apportés.

Témoignage de Mélanie, maman d’une Maëly, extrême prématurée de 810g

Comment se sont passées ta grossesse et la naissance de Maëly ?

J'ai eu un début de grossesse catastrophique : j’ai eu des nausées, j'ai perdu 8 kilos, je ne mangeais plus du tout. J’étais en arrêt maladie.

La sage-femme m’a précaunisé un médicament qui m’a changé la vie, il m'a permis de me nourrir de nouveau. Au 5ème mois, ils ont vu sur les échos que Maëly avait un problème de croissance. J’ai fait des prises de sang, je commençais à avoir un peu plus de protéines dans les urines mais moi, je ne connaissais pas tout ça ! On m'a dit, on va faire un suivi toutes les semaines au monitoring et toutes les deux semaines une échographie.

Un vendredi de mars, je suis partie voir une sage-femme et je lui ai parlé des protéines dans les urines qui étaient élevées. Elle m’a dit ne vous inquiétez pas ça peut arriver. Elle m'a rassurée vraiment à 1000%, je me suis dit bon bah c'est normal.

Le mardi suivant, je pars pour mon premier contrôle à Compiègne. Du coup, je me dis que ça va être un contrôle banal. Sauf que le monitoring ne s'est pas très bien passé. Ils ont fait une prise de sang et une analyse d'urine. Ils m’ont dit vous allez être hospitalisée jusqu'à l'accouchement, vous allez être héliportée à Amiens. Je me suis dis la situation est grave pour être héliportée ! Pourtant physiquement j’allais bien, je ne me sentais pas mal.

C’est à partir de là qu’on m’a parlé de pré-éclampsie*, de hellp syndrome. Pareil, je ne connaissais pas. La gynécologue m’a dit que le hellp syndrome est l’étape au-dessus de la pré-éclampsie, c'est vraiment tout ce qui touche la coagulation du sang.

Puis Maëly a fait des ralentissements cardiaques, du coup ils n’ont pas pris de risque, c’est ce qui a été décisif pour la césarienne.

Maëly est née le 24 mars, à 27 semaines d'aménorrhée plus 6 jours. C’est une grande préma. Elle faisait 940 g et 36 cm. Le lendemain, elle est descendue à 810 g. On se dit comment un bébé peut vivre en faisant 810 g, c’est impressionnant.

Quand je compte le poids de Maëly j'ai toujours dit que c'était un paquet de farine moins 200 g et que la superficie de sa tête était plus petite qu’une balle de tennis !

En tant que parents, comment avez-vous vécu la prématuré?

Moi j'avais déjà un peu connu cet univers parce que ma sœur a un enfant né à 34 semaines avec des complications.

Mon conjoint, lui, partait de zéro. Il a vu Maëly quelques minutes après sa naissance, toute petite dans un sac avec des tuyaux branchés partout. Ce sont des images qui resteront à vie, qui l’ont clairement choqué.

Quand je suis revenue de la salle de réveil que je lui ai demandé comment ça se passe, il m'a dit c'est choquant de voir un bébé comme ça !

Je n’y croyais pas au début quand elle est née, je ne voulais pas appeler le service parce que j’avais peur qu’ils m’annoncent une mauvaise nouvelle.

Moralement ça a été compliqué, rien que de se dire qu’elle est entre la vie et la mort, qu’on ne sait pas de quoi va être fait demain. Ça marque à vie ! Le parcours a été long, je pense que la période la plus dure c’est quand je suis rentrée toute seule sans elle. J’habite à Compiègne et l’hôpital est à Amiens. Tous les jours je faisais 180 km. C'était la période du mois de mars où l'essence était quasiment à 2 euros. Financièrement c’était dur mais c'était le prix à payer pour être avec elle.

Comment s’est passé ton premier contact avec ton bébé ?

Quand Maëly est née, le jeudi, je ne l'ai pas vue et je ne l’ai pas entendue, je ne me sentais pas bien. J’étais en hypertension à cause de la pré-éclampsie donc l’infirmière m'a perfusée et m’a dit vous n’allez pas voir votre fille aujourd'hui.

J’ai vu Maëly le lendemain. Au début son état était instable, je ne pouvais pas la prendre. J'ai pu la porter dans le creux de ma main et la prendre sur moi à partir du lundi.

Je me rappelle mon premier peau à peau, quand je l'ai prise sur moi, elle était minuscule. Elle me donnait des petits coups, c’était les coups que je ressentais dans mon ventre c’était vraiment étrange. Elle faisait des petits bruits. Je me disais comment un bébé peut être si petit.

Pendant combien de temps Maëly a été placée en couveuse ?

Elle est restée en tout 46 jours en couveuse. Un mois à l’hôpital d’Amiens durant toute la réanimation et les soins intensifs, puis à Compiègne jusqu'au mois de mai.

À Compiègne ils prenaient les prématurés à partir de 32 semaines donc il a fallu attendre. Il y avait aussi la condition du poids, il fallait qu'elle fasse 1,2 kg. Ensuite, est passée en lit chauffant.

Mais j'ai eu l'impression que dès l'instant où elle est sortie de couveuse, elle a beaucoup plus évolué.

Comment s’est passé le retour à la maison ?

Elle est née le 24 mars et est sortie de l’hôpital le 5 juin. Mais ça a été les montagnes russes !

La condition pour qu’elle sorte est qu’elle ne fasse pas de “bêtises” pendant 48 heures. Elle est donc sortie mais sous caféine parce qu’elle faisait des apnées.

On a acheté un matelas pour détecter ses apnées et au bout d’une semaine, le matelas a sonné en pleine nuit, Maëly était violette ! Du coup on est partis aux urgences et ils l’ont renvoyée en néonat pour la ré-hospitaliser. Ils l’ont rebranchée, ils voyaient qu’elle faisait toujours des bêtises, des bradys**, donc ils l’ont gardée. Au bout d’une semaine, ça allait mieux, on est ressorties.

Une semaine après, Maëly a dû retourner à l'hôpital pour faire ses vaccins. Ça s’est mal passé, elle a dû être de nouveau hospitalisée. Le mois de juin a été compliqué. Je pense honnêtement qu’elle aurait dû rester un peu plus à l’hôpital, plutôt que de faire autant d’allers-retours.

Tu fais souvent la différence entre l’âge réel et l’âge corrigé. Pourquoi est-ce aussi important ?

Aujourd'hui, Maëly a 6 mois en âge réel parce qu'elle est née au mois de mars. Mais vu qu'elle a 3 mois de retard, elle a 3 mois en âge corrigé, c'est-à-dire que physiquement elle ressemble à un bébé de 3 mois.

Et je l'ai vu cet été en vacances, elle était encore toute petite parce que elle avait 5 mois en âge réel et du coup 2 mois en âge corrigé. Les gens, quand ils la voyaient ils disaient, félicitations elle a 15 jours, elle vient de naître. Je leur disais, non non, elle a 4-5 mois, et ils étaient choqués.

Jusqu'à ses 2 ans, on parle d'âge réel et d'âge corrigé mis à part si elle arrive à rattraper son retard avant. Si a 12 mois en âge réel elle fait son âge corrigé, qu’elle a la motricité d'un bébé de 12 mois ,on n’est plus censé parler en âge corrigé.

Vous êtes-vous sentis soutenus ?

À Amiens, l’équipe était rassurante et le matériel performant. Il y a des infirmières avec qui ça a été le coup de coeur. Elles expliquaient bien, elles étaient là pour nous.

À contrario, quand on est passés à Compiègne, c'était différent, moins rassurant. Ce n'était pas le même niveau d'hôpital donc pas le même matériel non plus. Mais l'équipe était superbe. Il y a des infirmières avec qui je suis toujours en contact, à qui j'envoie des photos de Maëly.

Par contre depuis la sortie de l’hôpital, notre suivi avec le pédiatre a vraiment été catastrophique ! Le vrai pédiatre de Maëly qui la suit depuis qu’on est à Compiègne ne l'a pas revue. En juillet et août, ils étaient en sous-effectif, et en septembre le pédiatre n’était pas là. J’ai appelé d’autres cabinets mais ils ne prennent pas de nouveaux patients.

Heureusement, je suis suivie par mon médecin et la PMI. Ce sont eux qui m’ont donné tous les conseils, qui ont répondu à mes questions. Parce que sinon franchement je pense que j’aurais pataugé !

As-tu eu droit à des aides financières pour rester auprès de Maëly ?

Oui, j'ai fait une demande d'AJPP, c'est un congé rémunéré par la CAF pour les enfants qui ont un handicap. L'extrême prématurité rentre dans ce cas. C'est un congé de 6 mois qui est renouvelable une fois ce qui me permet de rester avec Maëly durant 1 an. Franchement heureusement, parce que je ne me voyais pas du tout la laisser à quelqu'un, surtout que ce n’est pas conseillé la première année.

L’AJPP peut être prolongée jusqu'à 3 ans mais pour la renouveler il faut une nouvelle pathologie. Ça veut dire qu’il faudrait qu’il y ait un nouveau souci donc d’un côté, je n’espère pas.

As-tu eu des difficultés à habiller Maëly ?

Quand je discute avec les mamans on a tous le même souci c'est qu’on ne trouve pas de vêtement pour bébé prématuré.

Tant qu'elle est en couveuse, qu'elle est branchée, qu’il y a des perfusions, ils ne mettent pas de body, ils la laissent vraiment en couche avec un lange ou son doudou. Moi je l’ai habillée 1 mois après sa naissance, elle devait faire peut-être 1,5 kg.

Lire l'article : Comment habiller un bébé prématuré ?

Comment va Maëly aujourd’hui ?

Physiquement je pense qu'il n’y a pas de séquelles, en plus elle est rentrée dans la courbe d’un bébé de 6 mois et elle a eu 6 mois, c’est un superbe pas en avant ! Maëly fait plus de 6 kg donc c’est plus pareil ! On voit le pédiatre en octobre, enfin ! Il nous dira ce qu’il en est.

Après, au niveau de la motricité, ça peut être plus long. Mais je mets tout en œuvre pour l’éveiller au maximum, pour l’aider à grandir et évoluer, pour rattraper ce retard de 3 mois.

*pré-éclampsie : Maladie de la grossesse causée par une malformation des vaisseaux sanguins du placenta.

**Bradyapnée : respiration ralentie


Mélanie et sa fille Maëly née prématuré

Merci 1000 fois à Mélanie pour son témoignage. L’échange fut très intéressant et très enrichissant. Découvrez également l’expérience de Mélanie sur son compte Instagram et TikTok @Maely27sa6j

On espère que cet article vous aura bien éclairé sur la prématurité des bébés. N’hésitez pas à le partager et à nous faire part de vos expériences.